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lundi 24 août 2009

Jérôme Attal, "Le garçon qui dessinait des soleils noirs"



Jérôme Attal a écrit plusieurs livres. Celui-ci est son troisième. J'avais déjà lu le premier : L'Amoureux en lambeaux, que le BUZZ… avait largement chroniqué. Je l’avais bien apprécié, et je l’avais beaucoup corné. Tout simplement parce que ce qui était dit était très juste. Noir, dur, peut-être, lucide en tout cas. Et je préfère cette conscience âpre, quitte à se brûler l’âme. Façon de parler. Ceci dit, le titre de cet ouvrage, plus narcissique que Le Rouge et le bleu ou Journal fictif d’Andy Warhol, les deux autres livres de Jérôme Attal qui évoquent, eux, la culture artistique pop (le premier avec les Beatles), reprend une image qui m’est cher : « le soleil noir ». Bien sûr, on pense à Nerval et à la mélancolie, mais plus qu’à la tristesse, j’y vois cette idée de contempler en même temps le soleil et la mort. Souvenons-nous de cette phrase d’Héraclite : « le soleil ni la mort ne se peuvent regarder en face »… Essayons quand même, et mieux.

Le héros est donc un garçon qui, dans son enfance, dessinait des soleils noirs : Basile Green. Artiste, il connaît un certain succès sur les scènes musicales, puis il se rend compte que cette reconnaissance ne lui correspond plus. Vide de sens, versatile - tout aussi synonyme d’absence que ses rencontres amoureuses, bien réelles mais creuses. Le hante le fantôme d’Anika.

A ce récit de Basile et d’Anika s’ajoutent deux nouvelles : La nuit verte et La solitude exécutée. La première relate une soirée entre jeunes gens, la seconde les jours tumultueux d'une colonie de vacances.


Ce qui est toujours intéressant, c’est cette écriture à fleur de peau, à la pensée profondément sentie. Le thème est amoureux, le propos acéré. Il m’est venu une réflexion tout à l’heure sur la naïveté, sur l’idéalisme (voire l’angélisme), en tombant par hasard – je vous le jure – sur un blog dont les poèmes dégoulinaient. De la guimauve. Peut-on dire réellement que cette personne est c... à penser ainsi ? « Bien naïve ! » « Ridicule ! ». Ce que j’en pense, c’est qu’on ne peut lui jeter la pierre d’aimer ainsi (en plus, c'était un petit bébé de trois ans). Le tort serait simplement de ne pas ouvrir l’œil, comme l’indique Döblin dans son Berlin Alexanderplatz, quand on fait oeuvre de bonté. Il ne faut pas confondre aussi, à l'inverse, la lucidité et le laisser-aller. Ce qui me conduit à reprendre ma petite note sur Basile Green et ses avatars. Défendons la littérature de l’intime, en général. Et cette mélancolie-là, en particulier, parce qu’au fond, dans cette désespérance, il y a un horizon, pas illusoire, ni rêvé : réel. Parce qu’il est une force. Le soleil et la mort. Tout est là.

Ce qui caractérise l’écriture de Jérôme Attal, c’est justement ce côté vague à l’âme, mélange de références contemporaines et de termes surannés. En découle une certaine intemporalité. Le romantisme est peut-être éternel, finalement. Ces phrases sont bizarres, me suis-je dit, sans savoir pourquoi. Elles m’échappent. Je ne dis pas ça, uniquement, pour l’utilisation des virgules, qui parfois tardent à venir. Les images, certains mots. Enfin, ce n’est peut-être que mon ressenti. Mais le rythme est authentique. Peu importe qui parle, seul compte le rythme, et à travers lui : le souffle. Jérôme Attal est un écrivain en mode mineur et un véritable auteur. On attend de voir, cependant, si ce "roman des fins d'adolescence" sera suivi de romans où l'adolescence n'est plus une nostalgie.

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